Le Jardin d’agronomie tropicale est fondé en 1899 en tant que « Jardin d’essai colonial », pour pratiquer des experiences agronomiques sur les plantes cultivées dans les colonies (cacao, vanille, café…); des serres et des batiments s’y établissent: une orangerie, un batiment de collection botanique, un hangar de manipulation et plusieurs autres batiments fonctionnels.
Dès l’année de sa création, et progressivement jusqu’en 1907, le Jardin d’Agronomie Tropicale hérite de nombreux monuments coloniaux ou d’inspiration coloniale exposés lors de différentes expositions universelles et coloniales françaises : en 1900, le jardin récupère le « Kiosque de la Réunion » et la « Serre du Dahomey » en provenance de l’exposition du Trocadéro, pour laquelle les industriels Meunier et Hamelle avaient offerts des serres. Le kiosque de la réunion y avait servi de bar à dégustation, notamment de rhum. En 1907, installé au JAT, il servira de poste de secours puis, pendant la guerre de 14-18, de lieu de stockage. Aujourd’hui, il a besoin d’une sérieuse restauration pour laquelle une association se mobilise actuellement.
A l’issue de l’exposition coloniale de 1906 au Grand Palais, le jardin hérite cette fois-ci du « Pavillon du Congo » (initialement réalisé pour l’exposition de Marseille en 1906), victime d’un incendie en 2004, de la « Maison cochinchinoise » (Marseille), de la « Porte chinoise » (rénovée en 2011 suite à la tempête de 1999) et de la « Tour d’Annam » (disparue aujourd’hui).La « Maison cochinchinoise » était la réplique d’une maison commune d’un village de la province du TU DAU MOT en Cochinchine; elle devint officiellement le « Temple du souvenir indochinois » en 1920, il s’agissait d’affecter le monument au culte des indochinois: « dans la culture indochinoise, le bonheur des morts dans l’autre monde dépend du soin donné aux tombes et de la célébration du culte aux âmes disparues ». C’était un grand bâtiment magnifique tout en bois sculpté et ouvragé. Ce pavillon a brûlé en 1984 et un temple plus modeste nommé parfois « Pavillon du Dinh » ou plus communément « Pagode » a été édifié à la place en 1992.
Il est devenu malgré tout l’emblème du jardin, notamment pour les instagrameurs!
Mais revenons au début du siècle: désormais dotée de nombreux monuments à thématique coloniale, le JAT présente en 1907 sa propre exposition coloniale ; pour l’évènement, le jardin construit de nombreux monuments, dont certains très importants. Pour faire venir du monde, Jean Thadée Dybowski, le grand artisan du jardin (et négociateur de l’arrivée des différents pavillons) reconstitue des villages, s’assure le concours du « Journal des voyages » et présente le « campement saharien » et le « dressage des éléphants de l’Inde ». Les éléphants auraient, selon certains témoignages, aidé à achever l’édification de l’exposition, notamment la construction de la Porte chinoise, et l’arrachage de certains arbres avant d’effrayer les habitants voisins en détruisant la clôture pour rejoindre le Bois de Vincennes! L’évènement, critiqué alors par de nombreux intellectuels modernes comme s’apparentant à un zoo humain, accueille entre un et deux millions de visiteurs.
Les limites du jardin, ainsi que ses entrées, sont modifiées très régulièrement au cours de ces années: on agrandit par ici, on cède par là. Passé de 2 hectares à sa création à 8 hectares en 1907, il est ramené à 6,5 hectares en 1908 qui ne bougeront plus.
De cette exposition de 1907 subsistent les pavillons Indochine (restauré en 2011), Guyane, Madagascar et Tunisie. Ce dernier, dont la rénovation s’est achevée en 2020, accueille aujourd »hui un restaurant tenu par l’association Food de Rue qui agit en faveur de l’insertion des femmes.
Pendant la première guerre mondiale, les pavillons servent d’hopital pour les troupes coloniales françaises et la première mosquée de France métropolitaine est érigée sur place (détruite lors de la construction de la Grande Mosquée de Paris). Le site accueille ensuite durant le vingtième siècle plusieurs institutions: l’Institut d’Agronomie Coloniale en 1921, le Centre Technique Forestier Tropical en 1949 et en 1960, l’Institut de Recherches Agronomiques Tropicales.
En 1931 a lieu une grande exposition coloniale autour du Lac Dausmenil, on construit le Musée des colonies pour l’occasion, aujourd’hui Palais de la Porte dorée-Musée de l’immigration.
Durant les années de la décolonisation, le jardin se trouve dans un abandon relatif, mais progressivement des institutions liées à l’aide au développement s’y installent. Il est longtemps fermé au public mais la Ville de Paris en reprend la gestion en 2003 et l’ouvre au public l’année suivante. On le nomme Jardin d’agronomie tropicale René-Dumont, l’un des pères de l’écologie moderne, ce dernier ayant été l’élève de l’Institut national d’agronomie coloniale.
Aujourd’hui, sous la banière de la Cité du développement durable, s’y regroupent notamment le Cirad, le Cired, le Gret, AVSF, Econovia, Kinomé, AFD, Johann le Guillerm, V’Ile fertile, Lcb, Onf international, Sorbonne Université… c’est à dire une pépinière d’institutions, d’entreprises et d’associations liées au développement durable et à l’aide internationale.
Le festival « Chant de la Terre » y prend sa place comme acteur culturel et se donne pour mission de créer une résonance musicale avec ce patrimoine riche, dans une approche inclusive, paritaire et respectueuse de l’esprit du lieu.
Venez découvrir le Jardin pendant la Promenade botanique et musicale, le dimanche 15 septembre à 17h avec Marianne Roussier du Lac (autrice), Sunghee Park (soprano) et Raquele Magalhães (flûte)